Mental
de singe..... Oui, j'ai bien dit de «singe» !!!
C'est
ainsi que les bouddhistes nomment les pensées omniprésentes qui
harcèlent de façon incessantes nos esprits. Mon souvenir reste
intact à la découverte de sa représentation dans le temple d'or de
Patan au Népal. Les larges chaînes enroulées autour de son cou ne
pouvaient pas mieux manifester les pesantes charges que nous
acceptons inconsciemment de traîner au quotidien. Le dit singe
tenait entre ses mains son propre cerveau tel un symbole à l'abandon
inconsidéré de notre propre esprit!
Dès la fin de la petite enfance,
la moulinette du mental finit, aussi progressivement
qu'insidieusement, de s'installer en nous et cela si profondément
que nous n'y voyons rien! Devenus adultes, englués dans nos activités
incessantes, nous ne trouvons mieux que de combler les quelques
espaces libres par du "divertissement"....
Tout précisément le
divertissement à l'éloignement de ce que nous sommes en réalité!
Lors de mes périples
solitaires dans le Haut-Himalaya -hymne à la reconnexion à soi- je
croisais chaque jour des personnes psalmodiant le plus fameux des
mantras:
«Aum mani padme hum»*.
«Car
laisser le pouvoir au mental de singe, c'est se déconnecter de la
Réalité...»
Elles
tenaient fermement leur mala enroulé autour du poignée, égrainant
chaque perle à la récitation des compatissantes paroles. J'y
décelais quelque chose de l'ordre du fanatisme voire de
l'aveuglement. Sans doute était-ce moi qui faisait preuve de la
cécité dont je les affublais!!!
Il m'a fallu fort longtemps
avant de capter le sens de la dite pratique et d'en découvrir les
vertus. Pour cela, il nécessitait que je comprenne ultimement qu'il n'y avait
rien de religieux ici! Comme l'ensemble des pratiques du
bouddhisme vajrayaniste, celle-ci n'était donc qu'un outil à la
dépollution du mental!
Transpercer le voile de l'apparence, il
le fallait afin de comprendre les puissants mécanismes au nettoyage
intérieur qui se présentaient au travers de cette pratique. A
l'aulne des mantras ou autres prières se jouait ici un exercice
tellement plus subtil que je ne l'aurais jamais imaginé!
Assurément identifié avait été ce «ron-ron» permanent du mental
ego et de son monologue intérieur! Car oui, nous sommes presque tous
habités par sa petite chanson encombrante....
Si encombrante et
permanente que nous avons cessé de nous rendre compte qu'elle n'est
pas ce que nous sommes à la racine de notre lumineuse nature! Elle
s'enclenche au réveil exactement comme lorsque nous tournons la clé
de contact de notre automobile. Nous appuyons sur l'embrayage et
passons les vitesses, actionnons les clignotants, tournons le volant,
freinons, accélérons.... Tout cela, nous le faisons dans
l'inconscience la plus totale et y ajoutons donc le fameux
divertissement, au cas où nous retrouvions conscience de l'instant
présent, par le biais de l'auto-radio.
Belle allégorie à nos
modes de fonctionnements permanents et quotidiens!
Il sonne là
telle une évidence combien nous pouvons transposer cette
inconscience à la conduite de notre véhicule roulant d'avec celui
de notre propre véhicule d'incarnation! Car laisser le pouvoir
au mental de singe, c'est se déconnecter de la Réalité. Celle du
si prestigieux et recherché «Instant présent». Si précieux est donc le titre du best-seller de Ecquart Tolle, «Le pouvoir de
l'instant présent».
Il est bien fâcheux d'avoir à le reconnaître
mais c'est trop souvent en traversant des expériences de souffrances
physiques et morales que nous nous trouvons à même de reconnecter
notre esprit à la dite présence! Être présent... Au
présent... En présence de soi puis du Soi... Voilà donc
toute l'Histoire qui nous prend et nous tient tous!
«Le
mental se nourrissait ainsi des folies insatisfaites qu'il avait
lui-même créé!...»
Au
creux de mes interminables marches de très haute montagne, je
découvrais la souffrance physique, chargé de mes quinze kilos, mais
surtout délesté en oxygène! A jamais gravée dans ma
mémoire, je me souviens de l'expérimentation du moment présent qui
m'y était âprement donnée.
Extrait:
«Mon cœur cherche dès lors une porte
de sortie à une cage thoracique définitivement trop étriquée pour
recevoir de tels battements.... Guère plus de dix pas ne servent à
me voir produire longue halte. Je dois me faire tellement violence
pour qu'il n'en soit pas ainsi. Allez! Toutes les cinquante
empreintes et je serai déjà mon propre héro. Plus question de
réciter des mantras à haute voix... C'est juste impossible. Pas
même mentalement car chaque millimètre de vaillance intérieure est
rivée sur mes accablantes godasses».
Car oui, altitude montante et
oxygène descendant, j'avais compris là le pouvoir du mantra.... Je
le sortais souvent de ce que j'avais pris soin de nommer ma boite à
outils spirituels!
A plus de dix mille kilomètres du
Finistère, je traînais encore avec moi le poids de mes soucis
quotidiens. Ils me suivaient partout mais je pouvais faire la
profonde découverte de leur omniprésence dans ces terrifiques
montées escarpées.
Ma solitude, le silence, l'absence de
divertissement, la difficulté physique et morale, toutes
concouraient puissamment à démasquer l'usurpateur en costume
d'apparat....
Seule la parfaite répétition des paroles
compatissantes et d'amour des mantras arrivaient à extirper de ma
tête le sournois ronronnement du petit ego. A cela même, il
finissait par trouver parade et, laissant ma trop légère vigilance
aux récitations se faire, arrivait à s'installer en arrière plan!
Je n'étais, encore une fois, plus réellement dans le présent! Le
mental se nourrissait ainsi des folies insatisfaites qu'il avait
lui-même créé!
Que dire des cohortes de peurs, craintes et
autres mésestimes de soi qu'il produit de la sorte par ricochet!
Quel parfait cercle vicieux!
En filigrane des mantras se
distillait donc l'apprentissage au seul remède possible: celui
de la vigilance à soi. La découverte de l'instant présent, c'est
aussi et surtout celle de l'introspection. De voir venir le mental
ego et de le raccompagner jusqu'à la porte de sortie...
Pour mieux,
soit dit en passant, le voir revenir par la fenêtre puis le conduit
de cheminée puis par la moindre petite fente dans le mur de votre
maison «moi»! Et vous n'avez pas même encore pris conscience
du large souterrain qu'il a construit pour revenir par le sous
sol!!! Nom de code de celui-là : l'inconscient! A
ce rythme, quand sommes-nous vraiment et totalement «moi» en
vérité?!
«C'est
un drôle de fardeau que de s'introspecter à chaque instant...»
J'expérimentais
donc la puissance du mantra qui par sa récitation concise, attentive
et déterminée érodait progressivement la prise de pouvoir
dictatoriale du mental! Évanouie la fausse impression de
fanatisme religieux bornée et obstinée au profit de la
compréhension médicative de sa pratique! Amoureusement épaulé
par cet outil spirituel, nul besoin n'est de traverser les affres de
la souffrance physique ou morale! Au lendemain du
franchissement de ce haut col himalayen, la lumière se faisait sur
des années entières d’entraînements spirituels.
A son
franchissement, j'y avais fait ce constat immédiat:
«C'est un
passage. Que dis-je, assurément la porte d'un rite initiatique».
Me venait alors ceci:
«Après tant d'efforts consentis,
de distances parcourues, de cols franchis, rien ne semble plus sonner
pareil. Des hauteurs, des largeurs, des profondeurs, des grands
écarts, il ne reste plus qu'une réalité: celle de
l'intériorité. L'ensemble de mes voyages, ces interminables
marches, courses à pieds ou treks aux longs courts m'ont finalement
ouvert une porte. Ce second voyage solitaire au pays des neiges
éternelles vient de me l'offrir. C'est un royaume entier qui se
dessine et se livre. Tout est enfin là. L'Everest, le désert du
Sahara, le pôle nord, la forêt amazonienne, les voilà soudainement
tous en mon propre sein. Si ces lieux énergétiques et esseulés
sont propices à la découverte de cela, qu'il en soit ainsi. ----
Alléluia----».
Il
me fallait, dès cet instant, apprendre la vigilance à soi et ce de
façon constante. Vous penserez sans doute que c'est un drôle de
fardeau que de s'introspecter à chaque instant mais que dire du
poids incommensurable du mental de singe qui vous interdit le retour
à vous-même?!
N'est-il pas le plus pesant des boulets à la
re-conquête de soi? Pratique venant, on se rend compte combien cela
est plutôt aisé et léger d'être vigilant à tout se qu'il se
passe intérieurement. Affûté tel un athlète de l'esprit, nous
finissons par voir arriver nos pensées envahissantes dans toutes les
situations et sous tous les déguisements à paillettes qu'elles
peuvent porter. Il n'est pas dit qu'elles n'arrivent pas à vous
faire penser, dire et même entreprendre des choses que vous auriez
préféré éviter mais force sera de constater que vous êtes
finalement en conscience....
Le pilotage automatique est
ainsi régulièrement dés-enclenché et vous permet de progressivement sortir du mode
permanent du type «Action/Réaction».
Cette prise de conscience
là, c'est la persévérance du mantra qui me l'offrit. A la fin des
récitations intérieures, antibiotiques au ressassement mental,
s'échappaient des plages de calme salvateur et jouissif. Le petit
ego ne baissait certes jamais les bras, trouvant faille à l'entrée
cérébrale. Néanmoins, l'esprit peut apprendre à se ressaisir lui
aussi! Hé hop! En offrande bienveillante aux possibles
sombres ruminements: une nouvelle déclamation de mantras... Si
certains le nomme aussi «saint calpa» ou plein d'autres choses
encore, peu importe du jeu des mots. Libre à vous d'inventer le
votre pour extirper le bonimenteur egotique! Il vous faut juste
ne jamais franchir le pas conduisant au fanatisme car seule compte
finalement la bienveillance et l'amour que vous arriverez
progressivement à vous portez à vous-même. A l'offrande que vous
vous faite de re-trouver votre merveilleux «instant présent».
Mantras ou autres prières telles le «Notre Père» et le «Je vous salue Marie» peuvent
trop facilement devenir un bête ânonnement de mots vidés de toute
leur substance compassionnelle! Ainsi, des années de
récitations sans conscience ne vaudraient pas une seule et unique
prière, ou mantra, vibrant d'amour et de bonté!
Nous l'avons
dit, ces pratiques sont des outils à la dépollution mentale et
lorsqu'il n'y a pas de clous à clouer, à quoi bon s'acharner à
garder son marteau à la main en tous lieux?!
Gardons alors toujours à
l'esprit de rester simple et tempérant en tous temps!
En
guise de conclusion, je m'en viens à vous livrer mon propre mantra:
«Je suis un être d'amour et de lumière et l'ensemble de mes
pensées compatissantes se réalisent dans la matière...» et mon
petit ego y trouve du grain à moudre... croyez-moi!
Je
vous souhaite le meilleur en tous temps et en tous lieux.
Yan SERRE.
Rédigé le 10/09/2019.
Extraits
issus de mon livre «Népalsolo Tome2. La révélation de soi.»
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Fraternellement,
Yan. https://www.le-couple-alchimique.com/
Om
mani padme hum :
«
C'est fort bien de réciter le mantra OM MANI PÉMÉ
HOUNG mais tandis qu'on le récite, encore faut-il penser à
sa signification, car la portée de ces paroles est vaste et
profonde. La première, OM, est composée de trois
lettres - A, U et M. Elles symbolisent le corps, la
parole et l'esprit du pratiquant; mais dans le même temps, elles
symbolisent le corps, la parole et l'esprit purs et glorieux d'un
Bouddha. Le corps, la parole et l'esprit impurs
peuvent-ils être transformés en un corps, une parole et un esprit
purs, ou sont-ils entièrement séparés? Tous les Bouddhas sont au
départ des êtres comme nous qui, en suivant la voie, sont devenus
des Éveillés. Le bouddhisme ne prétend pas qu'il y ait quelqu'un
qui, dès l'origine, soit sans défaut et possède toutes les bonnes
qualités. Le développement d'un corps, d'une parole et d'un esprit
purs vient graduellement de l'abandon des états impurs, qui sont
ainsi transmués en états purs. Comment cela se
fait-il? La voie est indiquée par les quatre syllabes
suivantes. MANI, signifiant joyau, symbolise les moyens
de la méthode - l'intention altruiste d'être illuminé, la
compassion et l'amour. Tout comme le joyau est capable d'éloigner la
pauvreté, de même l'esprit altruiste d'éveil est capable d'écarter
l'indigence, ou les difficultés, de l'existence cyclique et de la
paix solitaire. Pareillement, tout comme le Joyau exauce les désirs
des êtres sensibles, l'intention altruiste de devenir illuminé
accomplit les souhaits des êtres sensibles. Les deux
syllabes, PÉMÉ ou PADMÉ, signifiant lotus, symbolisent
la sagesse. Tout comme un lotus sort du limon sans être souillé par
la boue, de même la sagesse peut vous placer dans une situation de
non contradiction, alors qu'il y aurait contradiction sans posséder
la sagesse. Il y a la sagesse qui réalise l'impermanence; la sagesse
qui réalise que les personnes sont vides d'existence substantielle
ou d'existence se suffisant à elle-même; celle qui réalise le vide
de la dualité, c'est-à-dire de la différence d'entité entre sujet
et objet; et la sagesse qui réalise la vacuité de l'existence
inhérente. Bien qu'il y ait différentes sortes de sagesse, la
principale d'entre elles est celle qui réalise la vacuité. La
pureté doit être acquise par l'unité indivisible de la méthode et
de la sagesse, symbolisée par la syllabe finale HOUNG, OU
HÛM, qui traduit l'indivisibilité. Selon le système des sûtras
cette indivisibilité de la méthode et de la sagesse se réfère à
la sagesse affectée par la méthode, et à la méthode affectée par
la sagesse. Dans le véhicule Mantrique, ou Tantrique,
la référence porte sur la propre conscience dans laquelle la forme
globale, à la fois de la sagesse et de la méthode, constitue une
identité sans différenciation. En termes de syllabes-germes des
cinq Bouddhas conquérants, HOUNG est la syllabe
germe d'Akshobya - l'Immuable, le non-fluctuant, qui ne peut être en
rien perturbée. Ainsi, les six syllabes OM MANI
PÉMÉ HOUNG signifient qu'en fonction de la pratique d'une
voie, qui est l'union indivisible d'une méthode et d'une sagesse,
vous pouvez transformer votre corps, votre parole et votre esprit
impurs en corps, parole et esprit purs et glorieux d'un Bouddha. II
est dit qu'il ne faut pas chercher la bouddhéité hors de soi; les
matériaux pour y parvenir se trouvent à l'intérieur. Maitreya l'a
dit dans son « Sublime continuum du Grand Véhicule »
(Uttaratantra), tous les êtres ont naturellement la nature de
Bouddha dans leur propre continuum. Nous avons en nous-mêmes le
germe de la pureté, l'essence de Celui Qui S'en Est Ainsi
Allé (Tathâgatagarbha), qui doit être transformé et
pleinement développé en bouddhéité. »
Source:
Le seigneur du Lotus blanc, Le Dalaï-Lama, par Claude B. LEVENSON,
Paris,
Édition lieu commun, collection le livre de poche, 1987,
pp. 239 à 241.